LE DEUIL

Le deuil, un processus bien connu…

Le mot « deuil » décrit aujourd’hui, dans la plupart des usages, le processus résultant de la mort d’un être cher alors qu’étymologiquement il décrit la souffrance ressentie par le sujet (a.f. dueil, du latin « dolere », souffrir).

La souffrance provoquée par le deuil n’est pas une pathologie en tant que telle, comme le résume l’omniprésence de l’expression « faire son deuil » qui resitue bien cette épreuve en tant que constitutive de la condition humaine et de sa finitude.

Cliniquement, trois étapes principales pourraient être isolées :

  • Une phase d’« d’état de choc » dans un premier temps. Elle dure de quelques heures à quelques jours durant lesquels s’enchaînent des épisodes successifs possiblement de désespoir, de sidération, d’anesthésie affective, de grande fatigue et de régression.
  • Une phase dite « de dépression ». Elle dure de plusieurs semaines à un an avec une durée d’environ six mois pour la plupart des endeuillés. Elle s’exprime à la fois par un état émotionnel faisant coexister tristesse, colère et culpabilité -témoins de l’ambivalence de l’endeuillé- et un retrait social.
  • Une phase dite « de résolution » qui survient ensuite. Elle signe l’acceptation de la perte par l’endeuillé ainsi que la résurgence d’investissements anciens et l’apparition de nouveaux. Ceci décrit le cours normal du deuil mais un sujet peut échouer à entrer dans la dynamique du processus de deuil : on qualifie alors le deuil de « compliqué ».

    ….mais qui peut se compliquer.

    Cela se traduit de diverses manières : lorsque le sujet témoigne d’une indifférence à un moment où l’on attendrait la manifestation d’un désespoir, on parle de « deuil absent » ou de « deuil différé ». On peut observer, à l’inverse, des situations de « deuil intensifié », débordant largement le sujet. Le « deuil prolongé » s’étend anormalement au-delà de la moyenne, que les manifestations du chagrin soient patentes ou discrètes, et empêche l’endeuillé de s’investir à nouveau dans l’existence.

    Le « deuil pathologique » renvoie à tous les cas où il s’associe à trouble psychiatrique (de type hystérique, obsessionnel, délirant, anxieux ou dépressif).

    En ce sens, le psychologue clinicien dispose des connaissances qui lui permettent de repérer les signes d’un deuil compliqué ou pathologique, et d’être attentif aux personnes « à risque » en procédant à une anamnèse qui intégrera la question des circonstances du décès, des possibles pertes antérieures, d’éventuels antécédents psychiatriques mais aussi des conditions familiales et sociales etc.
    Car si un traitement médicamenteux peut s’avérer transitoirement utile, rien ne justifie de médicaliser à outrance une expérience existentielle qui contribue à nous faire humains et que nos sociétés modernes, par des rituels de plus en plus succincts, veulent oublier.

    Un lieu de parole libre

    L’apport du psychologue consiste d’abord à proposer un lieu de parole libre et sans auto-censure. Alors que les circonstances de la vie courante contraignent l’endeuillé à prendre en permanence sur lui pour cacher sa peine et « faire bonne figure ». Par ailleurs, ses connaissances lui permettent de repérer les éventuels signes avant-coureurs d’un deuil compliqué ou pathologique et d’intervenir en conséquence. Enfin, sa mission consiste non seulement à favoriser le passage souple d’une étape à l’autre dans ce processus douloureux mais aussi à ne pas s’en tenir à la seule verbalisation des émotions : les questions de la recherche d’un sens à construire pour ce qui est advenu mais aussi de la pacification du lien au disparu ainsi que celle de l’acceptation de son héritage symbolique sont au centre d’un processus thérapeutique abouti.

    Les autres deuils

    Notons par ailleurs qu’il peut être profitable d’étendre par analogie ce que l’on sait du processus de deuil concernant la perte d’un proche à d’autres vécus de perte. Ceux-ci sont souvent d’autant plus bouleversants pour le sujet que loin de lui témoigner de l’empathie, la société peut le culpabiliser de cette détresse jugée moins légitime (perte d’un animal de compagnie, perte d’une entreprise, etc.)

    Pour conclure, remarquons que là où un deuil se déroule initialement au mieux (autant que faire se peut) consulter peut représenter un apaisement sans être indispensable ; en revanche, c’est une absolue nécessité lorsque la douleur reste aiguë malgré le temps qui passe, lorsque surgissent des signes d’auto-destruction physique (anorexie, alcoolisation et autres conduites addictives etc.) ou psychique (humeur sombre, pensées suicidaires…).

LE BURN-OUT

Le « burn-out syndrom » ou syndrome d’épuisement professionnel

Si le « burn-out » se signale par des symptômes semblables à ceux de la dépression (épuisement physique et psychique, irritabilité, baisse de l’attention, troubles du sommeil, algies diverses…), le contexte d’apparition se révèle bien spécifique au sens où il suppose la rencontre entre une configuration professionnelle particulière et les points de vulnérabilité du sujet normal.

Des situations professionnelles à risque

En d’autres termes, certaines situations professionnelles sont repérées par les chercheurs comme « à risque ». Ce sont en général celles qui supposent, par exemple, un fort investissement affectif (c’est le cas des soignants ou des enseignants notamment), une responsabilité personnelle et puissamment engagée par rapport à autrui, ou encore des objectifs assignés soit trop élevés par rapport aux ressources, soit incompréhensibles, etc.

Une pathologie sociale…et individuelle

Même si la dimension collective prime (le burn-out est bien une pathologie avant tout sociale), il n’empêche que certains se révèlent moins sensibles que d’autres. On sait effectivement que la vulnérabilité d’une personne sera accrue si elle adhère à l’idée qu’elle « y peut quelque chose » (d’où le burn-out abusivement dépeint au début des recherches comme la « maladie des battants ») et si cette croyance est corrélée à une autre équation mettant en lien performance professionnelle et estime de soi – équation possiblement aggravée par une vie extra-professionnelle appauvrie.

Du stress au burn-out

Initialement, de chaque écart entre ses attentes et ce que lui renvoie le réel professionnel résulte un stress pour le sujet.

La répétition de ces stresses le conduit alors à mettre en place des réponses qui, à leur tour, alimenteront le stress initial : typiquement, une hyperactivité supposée apporter « la » solution, et qui s’avère finalement inefficace voire stérile.

La réponse suivante consiste alors en ce que les chercheurs ont malencontreusement nommé « dépersonnalisation » (alors que ce terme dépeint déjà en psychopathologie le tout autre sentiment d’être étranger à soi-même) puis « cynisme » (qui est une philosophie) alors qu’il aurait été plus adéquat de qualifier de réification (“chosification”). Pour prendre l’exemple du soignant, il s’agit du mécanisme qui consiste à mettre à distance son patient qui devient « l’ulcère de la chambre 12 ». Une caractéristique du burn-out est de rester longtemps indétectable car les mini-stresseurs (stresses initiaux successifs) n’occasionnent chez le sujet aucune réaction visible.

Pistes thérapeutiques

Là où un consultant en sociologie des organisations aborderait le volet social du burn-out en décrivant l’institution en vue d’en proposer la modification, le psychologue clinicien se focalisera dans un premier temps sur la personne pour comprendre, à travers son histoire, quels sont les enjeux relationnels et narcissiques et pourquoi ils sont vécus au point de mettre en jeu l’intégrité physique et psychique du sujet.

Dans un second temps, la connaissance de la vie en institution et en entreprise peut permettre au psychologue d’aller au-delà d’une approche clinique en aidant le patient à décrire et à analyser finement son environnement professionnel afin non seulement de trouver la « bonne distance » mais encore de parvenir à poser des limites entre ce qui relève de sa responsabilité et ce qu’il endosse à mauvais escient. Enfin, recenser les réponses mises en place par le patient en situation de stress professionnel et en analyser la pertinence contribue à mettre en place les conditions du changement

LA SEXUALITÉ

Le trouble peut concerner plusieurs niveaux distincts : l’identité sexuelle, l’orientation sexuelle, le comportement sexuel.

Identité

Le transsexualisme se distingue de l’homosexualité effeminée qui ne suppose pas cette volonté d’appartenir à l’autre sexe. Dans ce trouble de l’identité sexuelle, le sujet (généralement un homme) se vit comme appartenant à l’autre sexe : il ressent donc son corps comme incongru et souhaite en supprimer les caractères sexuels pour acquérir ceux de l’autre sexe.
Les difficultés sociales rencontrées déclenchent fréquemment une grande souffrance (épisodes dépressifs, tentatives de suicide).

Au niveau de l’orientation et des comportements sexuels, il faut souligner que la notion de « trouble » est contextualisée : elle existe dans un environnement culturel donné qui « dit » l’autorisé et l’interdit (par conséquent le normal et le pathologique) et ce de manière variable selon les lieux et les époques.
Par ailleurs, au-delà de la question de la norme -et donc du rapport à la transgression- c’est la souffrance du sujet (ou celle de son entourage) qui peut alerter sur l’éventuelle dimension pathologique.

Orientation

L’homosexualité ne figure ici que sous sa forme égo-dystonique : le sujet se plaint d’un attrait importun pour le même sexe. Son absence du désir pour l’autre sexe (alors qu’il souhaite une relation hétérosexuelle) le met dans une situation de souffrance.
Ajoutons que les comportements donjuanesques, fréquents chez l’homosexuel masculin, témoignent (comme chez les hétérosexuels) possiblement d’une certaine vulnérabilité narcissique.

Comportement

Dans les comportements sexuels, on peut retenir trois types de troubles : par « défaut », par « excès », par « déviance »

  • Le trouble « par défaut » peut se traduire à deux niveaux bien distincts : celui du désir, et celui de la satisfaction. Au niveau du désir, il importe de repérer un possible lien avec une personnalité (de type histrionique ou obsessionnel), avec un épisode dépressif, anorexique, sachant, une fois encore, que la souffrance du sujet et/ou du couple est un indicateur majeur dans le fait de considérer une situation comme pathologique ou non. Par ailleurs, plusieurs symptômes peuvent venir contrarier la satisfaction sexuelle et il faut éliminer toute possible cause physiologique avant de conclure à la dimension psychogène du trouble. Parmi eux, trois troubles fréquents : l’impuissance, la frigidité, la dyspareunie.

    – L’impuissance chez l’homme survient malgré une libido souvent présente : elle peut être « primaire » (elle a toujours été) , « secondaire » (c’est à dire survenant après une période de sexualité normale), occasionnelle. Les causes en sont possiblement multiples et il importe de faire procéder à un bilan chez son médecin (il existe de possibles perturbations endocriniennes, vasculaires, hématologiques, neurolgiques…) même si la dimension névrotique est fréquemment présente et donc sensible à la psychothérapie.

    – La frigidité chez la femme peut être totale (inhibition de l’excitation sexuelle) ou partielle (inhibition de l’orgasme semblable à celle, bien que rare, que l’on peut observer chez l’homme). Comme pour l’impuissance, la dimension psychogène du troubles est une hypothèse qu’il faut valider avant de s’orienter vers un travail sur soi.

    – La dyspareunie (douleurs génitales répétées pendant l’acte sexuel) touche possiblement les deux sexes et il importe d’en vérifier le caractère psychogène car de très nombreuses étiologies sont possibles.

  • Parfois, c’est l’excès de sexualité qui pose problème au sujet ou au couple.L’hypersexualité peut résulter d’une cause organique ou psychiatrique (dépression, phase maniaque du trouble bipolaire, schizophrénie…). lorsqu’elle est névrotique, il importe de comprendre quel sens assigne le sujet à la séduction permanente qu’il s’impose et d’explorer avec lui, entre autres, la question de l’image de soi.
  • Enfin la sexualité est parfois considérée comme “déviante”. Cette “déviance” devant être considéré en tant qu’elle crée une souffrance chez le sujet et non pas en termes de norme sociale. La question du choix de la zone corporelle (buccale, génitale, anale) ayant été progressivement « dépathologisée », les déviations sexuelles (ou « paraphilies ») concernent essentiellement le choix d’objet (inceste, pédophilie, gérontophilie, zoophilie, nécrophilie) et les conditions d’excitation (voyeurisme, exhibitionnisme, frotteurisme, triolisme, fétichisme, transvertisme, masochisme et sadisme sexuels).
    Elles peuvent venir perturber l’épanouissement sexuel et s’articuler à une culpabilisation. Elles renvoient à une problématique généralement précoce qui suppose une investigation et un travail approfondis.

LES PHOBIES

Des conduites d’évitement parfois impossibles

La phobie est une peur intense (et reconnue par le sujet comme irrationnelle) déclenchée par tel objet – au sens large (animé ou inanimé) – ou telle situation.
Dans ce contexte, le sujet phobique met en place des conduites d’évitement voire de réassurance (présence d’un objet ou d’une personne « contraphobique » à savoir dont la fonction est conjuratoire) ou même de « fuite en avant » (attitude de défi face à la situation phobogène).

On distingue généralement trois classes de phobies : les phobies simples, les phobies sociales et l’agoraphobie.

Les phobies simples ou « spécifiques » se restreignent à des déclencheurs précis, archaïques (le noir, l’orage etc.) ou non (animaux, moyens de transports…) .
Elles n’occasionnent généralement au sujet phobique qu’un désagrément limité , sauf à ce qu’il soit contraint à une exposition fréquente à l’objet phobogène (crainte des ascenseurs en milieu urbain par exemple).

Les phobies sociales sont le plus souvent liées au fait d’être en public : d’y parler, d’y manger ou d’y boire, même d’écrire, de rougir, d’être vu allant aux toilettes. C’est aussi, par exemple, la crainte de démériter sexuellement et de se disqualifier aux yeux du partenaire.

Une phobie bien spécifique: l’agoraphobie. Etymologiquement, c’est la peur à la fois de la foule mais aussi des grands espaces, et on la résume plus simplement désormais à une peur de sortir dans les lieux publics.
C’est la forme de phobie la plus invalidante au sens où elle restreint progressivement le champ social du sujet agoraphobe. Notons qu’on s’achemine vers un changement nosographique (c’est-à-dire de classification des maladies) car l’agoraphobie semblerait être moins une phobie que la complication d’un accès d’angoisse.

Il importe de poser un diagnostic différentiel précis afin de s’assurer, d’une part, que la phobie ne résulte pas d’un dysfonctionnement organique et, d’autre part, qu’elle appartient bien à une structure névrotique (par opposition à psychotique).
Dans cette perspective, la mise en relation des symptômes et de traits de personnalité bien définis est essentielle dans la démarche du psychologue clinicien.
Car “trouble phobique” ne signifie pas forcément “névrose phobique” : en effet, les phobies peuvent s’articuler à d’autres troubles psychiques (hystérie, troubles obsessionnels compulsifs ou TOC classiquement) voire en être la conséquence (une phobie sociale peut être consécutive à la peur que survienne une attaque de panique par exemple). Une fois encore, il importe donc de poser un diagnsotic précis pour concevoir une démarche thérapeutique adaptée.

D’où viennent les phobies ?

Les théories en présence se réfèrent à des cadres conceptuels très divers : là où la psychanalyse voit dans la phobie l’expression symblique d’un conflit entre désir et interdit, les comportementalistes y décèlent la manifestation d’un conditionnement initial précoce (lien stimulus neutre-réaction inconditionnelle) voire une prédisposition biologique à acquérir une appréhension.

Quel que soit le type de phobie, une psychothérapie de soutien est toujours fructueuse en ce qu’elle permet de mettre du sens sur l’expérience que fait le sujet de son symptôme avant de réfléchir aux modalités curatives.

LES T.C.A.

Les troubles du comportement alimentaire : comment en venir à bout ?

Ils sont divers, que ce soit dans l’excès, (gloutonnerie, hyperphagie, potomanie, dipsomanie, boulimie), dans le défaut (anoréxies) ou dans l’aberration (mérycisme, Pica, coprophagie, bizarreries alimentaires).

L’anoréxie

Nous n’évoquerons ici que l’anorexie et la boulimie, sachant que les accès de boulimie alternent possiblement avec des épisodes d’anorexie (on parle alors de « boulimarexie »), mais non nécessairement.

L’anorexie recouvre une restriction alimentaire conduisant à un amaigrissement visible (nié ou vécu dans une parfaite indifférence) associé à un surinvestissement intellectuel et moteur, à un désinvestissement de la sexualité et à une aménorrhée (chez le sujet féminin) ou à des troubles de la libido et de l’érection (chez le sujet masculin).
Elle peut être primaire, mais aussi souvent secondaire, entendez « secondaire à une autre pathologie psychique déjà présente » (névrose, dépression sévère, phase maniaque du trouble bipolaire, schizophrénie etc.)

Mentale ou somatique ?

L’anorexie fait partie des pathologies psychiques pour lesquelles il est indispensable de s’assurer qu’un bilan a été effectué par le médecin. Il importe en effet de faire la différence entre une anorexie d’origine organique (possiblement liée à un dysfonctionnement hormonal, à une tuberculose, à une tumeur, etc.) et une anorexie mentale.
Ensuite seulement pourront être abordés en thérapie l’histoire du sujet avec une attention toute particulière pour la question de l’image du corps, de la sexualité, de la relation à l’autre, mais aussi du défi, du contrôle…

La boulimie

La « boulimie », (étymologiquement « faim de bœuf »), c’est le besoin soudain et irrépressible, dans un moment d’anxiété ou de  vide , de « se remplir » d’aliments, parfois très caloriques, et en quantités importantes.
Les fringales sont fréquemment assouvies en secret avec un plaisir auquel succède rapidement un mal-être corporel (douleurs gastro-intestinales), une intense culpabilité et un mépris de soi d’avoir « cédé une fois de plus ».

Boulimie et sur-poids ?

L’épisode se clôt souvent par un endormissement, par des vomissements provoqués et tenus secrets, ou même par la prise de laxatifs supposés, comme les vomissements, « annuler » l’épisode boulimique. De ce fait, la boulimie ne se signale pas nécessairement par de l’obésité. A noter que comme pour l’anorexie,il arrive qu’une aménorrhée ou une irrégularité du cycle soit présente chez la femme boulimique.

La boulimie pouvant parfois jouer le rôle d’un équivalent dépressif, le psychologue clinicien sera attentif à rechercher une possible composante dépressive et/ou anxieuse et à repérer la présence éventuelle de traits obsessionnels.
Une fois le diagnostic posé, la déculpabilisation du patient est un préalable au travail sur le sentiment d’identité et sur la question de la carence narcissique. Enfin, il peut être fructueux d’associer à la psychothérapie d’autres techniques thérapeutiques (technique comportementale, thérapie de groupe, psychodrame, sophrologie, relaxation…).

 

LES ADDICTIONS

L’invincible besoin…

On parle d’addiction lorsqu’un sujet ne peut résister à la survenue répétée d’un comportement, et que celle-ci est précédée d’une tension croissante que seul le passage à l’acte soulage (sur le moment).
Notons qu’en cas d’impossibilité de s’adonner au comportement, le sujet ressent une anxiété pénible. Cet envahissement donne lieu à des tentatives répétées pour contrôler, réduire ou abandonner le comportement, mais en vain.

Pas toujours de “substance pharmacologique”…

Si la caractéristique pharmacologique de certaines substances (alcool, drogues, tabac…) joue un rôle reconnu dans la survenue d’une dépendance, on peut repérer des mécanismes identiques dans des addictions « sans substances (jeu pathologique, fièvre acheteuse, cyberdépendance, boulimie mais aussi parfois travail, sport, sexualité etc.) : il est donc plausible d’isoler certains invariants dans les personnalités sujettes aux addictions.

Une assise identitaire fragilisée (en termes d’autonomie psychique et/ou d’estime de soi) et d’un traumatisme désorganisateur survenu précocement ou non mais en lien avec la question de la séparation ou de la carence affective.
Le tout-petit ayant échoué à intérioriser le lien à la mère absente, toute absence est désormais vécue comme une perte. Un imaginaire qui s’appauvrit, une vulnérabilité à l’ennui et à l’anxiété, une relation compliquée à autrui, oscillant entre dépendance et évitement caractérisent ces profils.

Une angoisse débordante conduit alors le sujet à mettre en place une relation à un objet à la fois source de stimulation et de satisfaction immédiate (les sensations ont remplacé les émotions) et, croit-il, maîtrisable. L’objet de l’addiction (alcool, aliment, toxique notamment) permet au sujet d’exprimer sa toute-puissance dans une relation fusionnelle. Mais cette auto-suffisance s’avère rapidement illusoire car la sensation de manque replonge le sujet dans la dépendance à autrui qu’il croyait avoir ainsi vaincue.

Le principe de « tolérance » (besoin d’augmenter l’intensité ou la fréquence pour maintenir l’effet attendu) conduit fréquemment la personnalité addictive à présente à subir plusieurs dépendances, concomitantes ou successives.

Une pathologie rarement isolée

L’addiction peut se « greffer » sur tout type de personnalité en termes de nosographie psychopathologique (histrionique, passive-dépendante, obsessionnelle, évitante, borderline, antisociale…) et les liens avec d’autres troubles psychiques sont fréquents et complexes.

Une « réponse » à une autre pathologie : pour exemple, l’alcool comme les psychotropes ou tout type de médicament voire de comportement addictif peuvent en effet jouer le rôle d’objet contraphobique dans une lutte contre une névrose d’angoisse.
Elle peut également être inconsciemment investie par le sujet d’une valeur conjuratoire face à la menace dépressive résultant d’une fragilité narcissique. Ils représentent alors le mode de résolution « magique » des problèmes narcissiques et relationnels (avec ce qu’ils comportent de risque de frustration, d’abandon).

Le symptôme d’une pathologie non encore décompensée (dépression, schizophrénie etc.)

Un retour vers l’autonomie

L’enjeu en thérapie consiste à « rejouer » la relation à la mère pour permettre l’intériorisation progressive du lien, condition nécessaire pour parvenir à renoncer à l’illusion d’auto-suffisance et accéder enfin à l’autonomie.

LES RELATIONS DE COUPLE

Avec ou sans l’autre ?

Désamour, indifférence, incommunicabilité, mésentente, jalousie, adultère, violence… Les plaintes des patients se révèlent diverses mais s’accompagnent d’un réel désarroi quand ce n’est pas d’un véritable effondrement psychique, comme si l’harmonie du couple conditionnait l’épanouissement individuel.

De la psychologie à la philosophie…

Philosophique autant que psychologique, la question ne se résume t-elle pas in fine à une claire conscience de la relation Moi-Autre dans un apprentissage (douloureux) de la « bonne distance » ?

Effectivement, on rejoindra sans nul doute Martin Buber selon qui « L’homme devient un Je au contact du Tu (…) Devenant Je, l’individu peut alors se rapporter au Cela du monde » .

L’Autre du couple se résume t-il à n’importe quel Autre ? Ce serait éluder la tyrannie du Désir, alors même que nos sociétés modernes ont délaissé le mariage arrangé par les familles (en vue de constructions à moyen ou long terme, patrimoniales ou politiques) au profit du mariage d’amour…

Et si l’on définit, avec N. Grimaldi, le désir comme « l’attente d’une satisfaction qui comblerait celui qui l’éprouve » et que l’on veut bien se souvenir qu’ Eros se nourrit de l’inaccessibilité de l’aimé(e), quel est le sens d’un « mariage d’amour » ?

Monogamies successives …Voilà donc chacun(e) face à l’aporie suivante : faire coïncider passion éphémère et pérennité de l’engagement, sachant que le second terme annule, par nature, plus ou moins rapidement le premier… Dans un tel contexte, une alternative s’offre à nous : soit oublier Eros pour Philia (joie que l’Autre existe) voire Agapè (l’amour divin et inconditionnel), soit recommencer la même séquence avec un autre partenaire (monogamies successives), les enfants se trouvant alors fortement investis du désir de durée, dans la mesure où le spectre du couple n’est plus celui du joug conjugal mais bien de la séparation…

Deux perspectives au moins pour aborder une problématique concernant le couple :

– Une approche qui consisterait à aborder le paradigme du couple sous l’angle d’un « tout qui serait plus que la somme des parties » et l’on s’oriente alors vers une thérapie de couple, qu’il s’agisse d’une appréhension systémique du couple dont on tente de modifier le fonctionnement communicationnel, ou qu’il s’agisse d’une approche psychanalytique voire psychodramatique ;

– Une approche où l’on considère le couple en tant que rencontre « nécessaire » (au sens de « qui ne peut pas ne pas être » ) de deux singularités : l’approche psychothérapique concerne alors le sujet singulier dans son couple et vise à ce qu’il parvienne, lui, à comprendre ce qui s’est joué le concernant dans la constitution de son couple, à identifier ce qu’il attend de cette relation et à définir les conditions de possibilité/impossibilité relatives à la pérennité du couple.

L’ANXIÉTÉ

Là où la peur constitue une réaction normale et utile à notre conservation (elle permet d’échapper au danger), l’anxiété pourrait être décrite comme une peur “irrationnelle” possédant les caractéristiques cliniques de la peur « normale » : un sentiment d’appréhension associé à des manifestations physiques variables (cardio-vasculaires, respiratoires, digestives, génito-urinaires, neuro-musculaires, neuro-végétatives etc.).

Une réaction disproportionnée…pour les autres

Il s’agit donc d’un état psychique caractérisé par une crainte manifestement illogique ou disproportionnée aux yeux d’un observateur extérieur (le mot « angoisse » décrivant, dans la perspective française, les manifestations somatiques de l’anxiété, bien que de nombreux auteurs utilisent indifféremment les deux termes).

Anxiété “normale” ou pathologique ?

Il est par ailleurs difficile de poser une limite explicite entre une anxiété qui serait normale (en tant qu’expérience tout simplement humaine ne débordant pas le patient) et une anxiété pathologique, au sens où elles sont en réalité de même nature et ne diffèrent qu’en termes de « quantité », pour ainsi dire.
C’est donc la subjectivité du patient qui se sent « envahi » par cette anxiété qui permet de poser que l’anxiété est « pathologique ».

Diagnostic différentiel

L’anxiété peut se apparaitre de manière aiguë (attaque de panique) -avec ou sans idées associées- ou chronique, des symptômes identiques à ceux de l’accès aigu se manifestant alors à bas bruit et s’accompagnant souvent de troubles du sommeil.

Comme pour la dépression, ce n’est qu’après s’être assuré qu’il ne s’agit pas du symptôme d’une affection organique que l’on peut entreprendre un travail en thérapie.Il convient alors d’identifier le type d’anxiété auquel on a affaire.En effet, si l’anxiété est constante dans tous les tableaux névrotiques, elle peut aussi être réactionnelle à un événement identifié comme traumatisant ou encore constituer un véritable équivalent dépressif (qui masque alors le symptôme dépressif).

Il va de soi que la qualité du diagnostic est un élément essentiel à l’élaboration d’un cheminement thérapeutique pertinent.

Depression

LA DÉPRESSION

 Dépression ou dépression ? Comment faire la différence ?

La dépression est un trouble dit « thymique » (de l’humeur), Elle toucherait (source Institut National de Veille Sanitaire) 5 à 7,8 % des Français.

Dépression ou non ?

La dépression associe de manière variable et complexe un trouble de l’humeur, des troubles somatiques extrêmement divers et surtout, signe pathognomonique (qui caractérise la maladie), un ralentissement psychique et moteur en général visible -sauf à ce qu’il soit masqué par une agitation anxieuse.
Il ne suffit donc pas de se sentir triste pour relever de cette maladie. « Déprime » et « dépression majeure » ne sont pas synonymes : seul un diagnostic posé à partir de critères cliniques précis permet de construire une prise en charge adaptée. Ainsi, la souffrance morale -que le diagnostic de dépression proprement dite soit avéré ou non- pourra être travaillée et apaisée…

Si c’est une dépression, laquelle ?

Même lorsque l’hypothèse d’une « dépression » se confirme, encore faut-il préciser si elle est endogène (l’ancienne « mélancolie ») ou psychogène ; et dans ce dernier cas, si elle est névrotique ou réactionnelle.

Imaginons, à titre d’illustration, une personnalité de type phobique (qui manifeste une angoisse démesurée à la vue d’un objet ou d’une situation), de type obsessionnel (qui compte, range, nettoie, ou vérifie tout etc.), de type hystérique (qui aurait besoin d’un public sans jamais parvenir à nouer de vraies relations) : une personnalité « névrotique » comme celles énumérées ci-dessus développe fréquemment une dépression du fait-même du caractère envahissant de son symptôme, qui finit par réduire sa vie à un enfer ou à un désert social…Idem pour des personnalités dépendantes ou « addictives ».

Une telle configuration n’aurait rien à voir avec la dépression d’un patient qui ne parviendrait pas à surmonter un échec, une perte ou un deuil, et ne supposerait par conséquent pas le même type de travail en thérapie.

Et l’on pourrait multiplier ce type d’exemples cliniques à l’infini, soulignant ainsi la nécessité de savoir se référer à une culture en psychopathologie dans laquelle la capacité d’écoute est certes nécessaire mais non suffisante.