L’invincible besoin…
On parle d’addiction lorsqu’un sujet ne peut résister à la survenue répétée d’un comportement, et que celle-ci est précédée d’une tension croissante que seul le passage à l’acte soulage (sur le moment).
Notons qu’en cas d’impossibilité de s’adonner au comportement, le sujet ressent une anxiété pénible. Cet envahissement donne lieu à des tentatives répétées pour contrôler, réduire ou abandonner le comportement, mais en vain.
Pas toujours de “substance pharmacologique”…
Si la caractéristique pharmacologique de certaines substances (alcool, drogues, tabac…) joue un rôle reconnu dans la survenue d’une dépendance, on peut repérer des mécanismes identiques dans des addictions « sans substances (jeu pathologique, fièvre acheteuse, cyberdépendance, boulimie mais aussi parfois travail, sport, sexualité etc.) : il est donc plausible d’isoler certains invariants dans les personnalités sujettes aux addictions.
Une assise identitaire fragilisée (en termes d’autonomie psychique et/ou d’estime de soi) et d’un traumatisme désorganisateur survenu précocement ou non mais en lien avec la question de la séparation ou de la carence affective.
Le tout-petit ayant échoué à intérioriser le lien à la mère absente, toute absence est désormais vécue comme une perte. Un imaginaire qui s’appauvrit, une vulnérabilité à l’ennui et à l’anxiété, une relation compliquée à autrui, oscillant entre dépendance et évitement caractérisent ces profils.
Une angoisse débordante conduit alors le sujet à mettre en place une relation à un objet à la fois source de stimulation et de satisfaction immédiate (les sensations ont remplacé les émotions) et, croit-il, maîtrisable. L’objet de l’addiction (alcool, aliment, toxique notamment) permet au sujet d’exprimer sa toute-puissance dans une relation fusionnelle. Mais cette auto-suffisance s’avère rapidement illusoire car la sensation de manque replonge le sujet dans la dépendance à autrui qu’il croyait avoir ainsi vaincue.
Le principe de « tolérance » (besoin d’augmenter l’intensité ou la fréquence pour maintenir l’effet attendu) conduit fréquemment la personnalité addictive à présente à subir plusieurs dépendances, concomitantes ou successives.
Une pathologie rarement isolée
L’addiction peut se « greffer » sur tout type de personnalité en termes de nosographie psychopathologique (histrionique, passive-dépendante, obsessionnelle, évitante, borderline, antisociale…) et les liens avec d’autres troubles psychiques sont fréquents et complexes.
Une « réponse » à une autre pathologie : pour exemple, l’alcool comme les psychotropes ou tout type de médicament voire de comportement addictif peuvent en effet jouer le rôle d’objet contraphobique dans une lutte contre une névrose d’angoisse.
Elle peut également être inconsciemment investie par le sujet d’une valeur conjuratoire face à la menace dépressive résultant d’une fragilité narcissique. Ils représentent alors le mode de résolution « magique » des problèmes narcissiques et relationnels (avec ce qu’ils comportent de risque de frustration, d’abandon).
Le symptôme d’une pathologie non encore décompensée (dépression, schizophrénie etc.)
Un retour vers l’autonomie
L’enjeu en thérapie consiste à « rejouer » la relation à la mère pour permettre l’intériorisation progressive du lien, condition nécessaire pour parvenir à renoncer à l’illusion d’auto-suffisance et accéder enfin à l’autonomie.